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Le portrait du mois : Daniel Kahn, avocat à la pointe des nouvelles technologies et de la croissance

1 mars 2010

Daniel Kahn, avocat à la pointe des nouvelles technologies et de la croissance Daniel Kahn, avocat fondateur du cabinet Kahn & Associe?s, est reconnu comme l'un des experts les plus éminents des secteurs des Technologies de l'Information et d'Internet.

Portrait réalisé par Françoise Elkouby

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didier_kahn_3Pionnier dans l'âme et passionné par toutes les idées nouvelles qui émergent des écosystèmes de l'innovation et du développement, Daniel Kahn en connait bien toutes les arcanes. L'homme est chaleureux et convaincant. Il m'explique son métier avec cette modestie et cette simplicité des grands qui rendent ce qui nous semble complexe et opaque, d'une transparence et d'une simplicité biblique.

Né à Strasbourg il y a 52 ans, Daniel Kahn fait ses études au Lycée Fustel et passe une maitrise en droit à l'université Robert Schuman de Strasbourg. Il part ensuite étudier à la Northwestern University School of Law de Chicago ou? il obtient un Master of Laws. Il n'était pas courant, dans les années 70, d'aller étudier aux Etats-Unis. Puis, durant un an, il fait ses premières armes dans des cabinets d'avocats, successivement à Chicago, puis à New York, en tant que spécialiste du droit des affaires, Début 1981, il revient en France comme collaborateur du grand cabinet new yorkais d'avocats, Cleary, Gottlieb, Steen & Hamilton. "J'ai eu beaucoup de chance d'avoir pu travailler pour cet important cabinet américain à Paris, qui opérait essentiellement pour des sociétés américaines, dont certaines, allaient être des sociétés précurseurs en technologie. Il faut se rappeler ce qu'était cette époque; nous ne disposions en 1981 ni d'ordinateur, ni de fax mais de machines à écrire IBM à boules et de télex. J'ai ensuite eu la chance de participer à l'implantation en France de plusieurs sociétés informatiques américaines, et ai, pour l'anecdote, été le premier à rédiger en français les contrats de licence de logiciel standard; ces documents ont d'ailleurs fait école par la suite... J'ai énormément apprécié de travailler dans ces domaines, oû tout était innovation et rien n'était figé." commente Daniel Kahn.

En 1988, il quitte le cabinet américain et fonde son propre cabinet d'avocats en droit des affaires pour les sociétés de technologie. "On m'avait traité de cinglé au motif qu'il n'y avait aucun avenir dans ce secteur.(sic!) Je me suis envolé pour Palo Alto en Californie, et y ai prospecté pour trouver mes premiers clients. J'ai travaillé seul durant la première année. J'ai également prospecté à Tel Aviv, autre creuset de la technologie. Et depuis lors, nous comptons, parmi nos clients, des sociétés internationales essentiellement basées sur la côte ouest-américaine et en Israël, que nous aidons à s'installer en France ou à y faire des acquisitions.

Le cabinet, dénommé Kahn & Associés et basé dans un bel hôtel particulier à quelques jets de pierre de l'Etoile, a bien grandi. Il rassemble aujourd'hui 35 avocats et opère dans le domaine choisi par Daniel Kahn dès ses débuts. Cabinet généraliste de droit des affaires : droit des sociétés, du travail, droit fiscal, de l'immobilier, des contrats, de la technologie, du contentieux, il travaille aussi bien pour des sociétés en création que pour des multinationales. Son coeur de cible vise des sociétés internationales ou françaises à forte croissance, notamment dans le secteur des technologies --produits et matériels-- mais aussi toutes les questions liées à internet, le commerce électronique et tous les modèles sur internet, et dans d'autres domaines technologiques comme les biotech, medtech, greentech, cleantech, et enfin, le sport et les médias. "Nous opérons à 50% pour des sociétés étrangères qui font des affaires en France et à 50 % pour des sociétés françaises qui font des affaires à l'international. Pour ce faire, nous avons créé notre propre réseau international informel de cabinets d'avocats d'affaires avec lesquels nous coopérons dans de nombreux pays du monde. Nous venons d'ailleurs d'annoncer une alliance exclusive avec un très important cabinet chinois qui compte 250 avocats, basés à Pékin, Shanghai et Shenzen. Enfin j'ajouterais que je consacre beaucoup de temps à rencontrer du monde , ici à Paris mais aussi à l'étranger, notamment en Californie, en Israël ou en Chine."

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Votre rôle de juriste est de conseiller, accompagner et rassurer vos clients. Mais comment gérez-vous l'antinomie entre risques et sécurité ?

« Les sociétés à croissance forte et rapide, qui opèrent dans les domaines innovants que je viens d'évoquer, rencontrent évidemment des risques et des contraintes. Elles ont besoin d'être accompagnées par des professionnels aguerris à ces activités à forte croissance. C'est un vrai métier en soi que de les conseiller. Ayant la connaissance et l'expérience du fonctionnement de ces sociétés et de leurs produits, nous sommes rompus à les assister dans leur développement, et ceci dans toutes sortes d'occasion, notamment une levée de fonds, l'entrée en bourse, l'acquisition d'une société, l'achat de nouveaux produits, le dépôt de brevets, etc. Notre rôle est d'accompagner et de rassurer le décideur en couvrant un maximum de risques, sans empêcher toutefois l'innovation et la croissance. Il nous faut trouver le juste équilibre. L' essentiel est de bien comprendre les risques, de bien les expliquer au client et de l'accompagner, sachant pertinemment qu'il prend souvent des risques. »

Qu'est qui vous fait courir... pour être toujours à la pointe de la technologie et des nouveaux modes de développement ?

« J'aime être au contact des hommes et des femmes qui ont des idées nouvelles, font preuve de courage, d'énergie, et désirent entreprendre, innover et se développer. Je puise mon énergie dans leur énergie et j'essaie d'apporter la mienne. Mon métier est en réalité un poste d'observation et d'interface formidable entre tous ces acteurs de l'innovation et du développement, qu'ils soient entrepreneur, venture capitalist, banquier d'affaires, introducteur en bourse, ou investisseurs. Je me situe au milieu de ces écosystèmes et y participe à mon échelle. »

Vous avez été le premier avocat à être branché sur internet en France.

« J'avais en effet été contacté par Next, société que dirigeait Steve Jobs avant Apple en 1991. Pour devenir mon client, ils nous demandaient de nous équiper de leur station de travail et de nous connecter à internet. J'étais le 4ème client du fournisseur d'accès, qui m'avait été recommandé. C'est dire que je vis internet depuis ses balbutiements. Dans les années 1992-95, j'ai participé à la réflexion lancée par les pouvoirs publics sur la problématique de régulation de l'usage d'internet. Il s'agit d'une question passionnante qui a bouleversé la vie de toute la société et du monde. On a parfois dit et écrit n'importe quoi sur cette thématique. Or,il faut, me semble-t-il, faire preuve de bon sens, et trouver un juste milieu entre réglementation et usage, concilier les intérêts des États et les libertés publiques. J'ai des idées précises sur ces questions car, par mon métier je le vis quotidiennement . En 2009, Hervé Morin, ministre de la Défense m'a mandaté en tant que co-re?dacteur de la De?claration des Droits Fondamentaux Nume?riques afin de mettre sur papier certains concepts fondamentaux qu'il faudrait respecter. Je pense que mon rôle n'est pas uniquement de travailler pour nos clients, mais aussi d'apporter un plus à la société dans laquelle nous vivons. En somme, j'ai un esprit de pionnier et chaque jour est un nouveau jour, avec son nouveau challenge. »

Votre métier est aussi fondé sur les relations humaines ?

didier_kahn_2« Absolument, les contacts sont primordiaux dans mon métier, que ce soient pour les contrats, les créations de sociétés, les pactes d'actionnaires ... Ma valeur ajoutée, c'est non seulement de bien faire mon métier de base, mais aussi de challenger sur des idées, d'apporter des idées aux clients, d'ouvrir des portes et de mettre des gens en contact. Les sociétés à croissance rapide ont forcément besoin de nouveaux contacts, que ce soit pour s'entourer de nouvelles compétences, pour les aider à trouver de nouveaux financements, ou de nouveaux intermédiaires en cas d'acquisition etc.. ou simplement pour challenger des idées. Je pense au cas d'une société qui avait fait plusieurs tours de table et se trouvait dans une situation très compliquée face à de nombreux actionnaires et investisseurs potentiels. J'ai alors proposé une entrée en Bourse, idée qui a été accueillie très favorablement, ce qui a permis à l'entreprise de lever des fonds et de se développer à la grande satisfaction de tous les acteurs. En somme, dans ce cas, nous avons été initiateur en proposant une idée, et non pas seulement accompagnateur de l'entreprise dans sa démarche. »

Pourquoi avez-vous choisi de développer votre Cabinet à l'international ?

« D'une part, je suis curieux, j'aime découvrir les autres cultures, et rencontrer des gens qui ont vécu ailleurs et autrement et accompagner nos clients à l'international. D'autre part, le marché est aujourd'hui totalement global. Les moyens technologiques dont nous disposons,, nous offrent des opportunités exceptionnelles.

Pour illustrer mon propos, je pense au cas d'un client qui tout récemment sollicite mon conseil, souhaitant faire une opération sur le nouveau marché boursier de la Bourse de Shenzen. Je fais une rapide recherche sur Google et trouve un article expliquant les règles de fonctionnement de la Bourse en Chine. Aussitôt, je contacte par mail mon confrère chinois . Et, 30 minutes plus tard, j'étais en mesure de transmettre une note d'information détaillée à mon client, lui expliquant que son projet n'était pas viable pour des raisons diverses liées à la réglementation de la bourse chinoise. C'est extraordinaire. Nous n'aurions jamais pu imaginer il y a 20 ans qu'il eut été possible de trouver réponse à une question aussi technique et de surcroît en Chine en si peu de temps.

D'ailleurs, outre les sociétés américaines, israéliennes et françaises, nous développons nos activités avec le marché chinois que ce soient pour des entreprises chinoises intéressées par la France, ou pour des entreprises françaises désireuses de se développper en Chine. C'est passionnant car ce pays est si différent de ce que nous connaissons.Nous préparons un voyage en Chine afin de permettre des rencontres entre nos clients français et des sociétés chinoises, ce que nous faisons déjà avec Israël, et la côte ouest des Etats Unis. J'apprécie énormément cette ouverture internationale, c'est pour moi vivre pleinement dans notre monde d'aujourd'hui. »

Vous êtes sensible à l'expression artistique ?

didier_kahn_4« J'aime la création artistique en général. je n'ai pas de prédilection particulière. Je dirais simplement que j'aime les belles choses qui me parlent. Un exemple, je suis fasciné par le portrait de l'Alsacienne de Jean-Jacques Henner, ce grand peintre alsacien dont le musée vient de rouvrir à Paris. » Et il me montre la reproduction de cette belle peinture sur son écran d'ordinateur. La technologie au service de l'art.

Parlons de l'Alsace : quelle est votre perception de ses forces et de ses faiblesses ?

« L'Alsace possède énormément d'atouts et de qualités, bien connus de tous, comme sa localisation géographique en Europe, la qualité de ses hommes et de ses femmes, que je ne détaillerai pas davantage. Sur le plan des affaires, l'Alsace compte de nombreuses belles entreprises qui ne datent pas d'hier, lesquelles se sont développées à l'international et à l'export. Et dans mon domaine de prédilection: l'innovation et la croissance, on y trouve aussi de beaux exemples.

Mais, l'Alsace a, pour le businesss, une faiblesse qui tient à son image. Autant, notre belle région jouit d'une très forte notoriété pour tout ce qui relève du tourisme et du bien vivre (gastronomie, vins), les marchés de Noël et de son patrimoine, autant elle est malheureusement peu connue en termes d'innovation et de technologie. J'en veux pour preuve ma propre expérience en 2009, lors de la préparation du Techtour 09 auquel j'étais associé. J'avais proposé que la région visitée par le groupe de 70 investisseurs français et internationaux soit l'Alsace et j'ai rencontré une désapprobation quasi unanime. J'ai insisté et au final, le Techtour est venu en Alsace. Le groupe a été très bien reçu par les décideurs alsaciens. Au terme du voyage, les investisseurs participants ont été unanimes à reconnaitre qu'ils ont été extrèmement surpris de découvrir sur place les points forts dont l'Alsace dispose dans ces domaines. Il faut vraiment les valoriser et les faire connaître largement. C'est là où réside à mon sens la faiblesse de l'Alsace, et il faut y remédier. En termes d'image en France et à l'international, l'Alsace doit présenter ses atouts économiques et d'innovation pour attirer les investisseurs. C'est une question primordiale, car l'image joue un rôle décisif dans leurs choix d'implantation. Je suis bien placé pour le dire. »

Que pensez-vous du Club des ambassadeurs d'Alsace ?

« C'est une très belle idée, une magnifique initiative que d'associer à l'Alsace des ambassadeurs basés partout dans le monde. Le Club des ambassadeurs permettra à l'Alsace de rayonner et de diffuser sa communication. Pour ce faire, il a besoin d'un réseau social, d'un site internet, de documents de communication sur l'Alsace en plusieurs langues, mis à disposition des ambassadeurs et d'une petite charte expliquant les droits d'utilisation du titre d'ambassadeur. En somme, une boite à outils des ambassadeurs. »

Comment définissez vous un bon ambassadeur d'Alsace ?

« Être ambassadeur d'Alsace ne doit pas être un titre de gloire mais un engagement à jouer un rôle pro actif dans la diffusion de l'information et la promotion de la région auprès de ses contacts professionnels, de ses réseaux, et s'il en a la possibilité à faciliter, voire à proposer l'Alsace pour des projets dont il aurait connaissance. Il me semble que le club n'a pas vocation à devenir l'amicale des gens qui aiment l'Alsace et rassembler des milliers de membres. Il peut être plus sélectif afin de bien choisir les ambassadeurs selon leur capacité à faire rayonner l'Alsace dans le monde.

Un exemple : lors de mon dernier voyage à Palo Alto, j'ai rencontré le dirigeant d'un grand cabinet d'avocats. Lors de notre entretien, nous nous sommes rendu compte que nous avions un point commun : nos origines alsaciennes (en ce qui le concerne, qui datent de ses arrières grands parents). Aussi, je lui ai parlé du Club des Ambassadeurs d'Alsace et l'ai introduit auprès de Vincent Froehlicher. Je puis vous assurer que lorsqu'un de ses clients recherchera une implantation en Europe, il lui parlera des atouts de l'Alsace. Et il nous reste à trouver des ambassadeurs dans toutes les régions du monde qui ainsi feront rayonner l'image de l'Alsace. »

Portrait chinois de l'Alsace :

Si l'Alsace était...

  • Un objet : le tableau "L'Alsace, elle attend" de Jean-Jacques Henner
  • Un moment : un soir de printemps en Alsace
  • Une personne : Vincent Froehlicher en tant qu'Ambassadeur en chef
  • Un lieu : Strasbourg
  • Une musique : La Marseillaise
  • Un animal : la cigogne
  • Une oeuvre d'art : la peinture citée plus haut de Jean-Jacques Henner
  • Une couleur : bleue

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Le 1er avril 2010 : découvrez le portrait de Bernard Kuentz, grand maître de la Maison de l'Alsace.


Lire les portraits réalisés par Françoise Elkouby :

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